Les élèves en seconde année de l’école supérieure d’arts appliqués ont repensé ces 107 fontaines qui distribuent de l’eau potable mais dont l’utilisation n’est plus forcément adaptée aux usages modernes. Une question qui prend un intérêt particulier en cette période de grandes chaleurs.
« Le point de départ, c’était cette fontaine hors du temps. Nous devions plancher sur son adaptation à l’usage d’aujourd’hui », lancent les jeunes de l’école Boulle, l’une des quatre grandes écoles parisiennes destinées à la création appliquée à l’industrie, heureux de présenter chacun le résultat de leur travail issu d’un appel à idées passionnant sur les utilisations possibles de la fontaine Wallace. « Nous avons pris toutes les directions possibles », constate Robin, 19 ans. « Et toutes les idées sont complémentaires », ajoute Raphaël, 19 ans également, étudiant lui aussi en seconde année.
La quinzaine d’étudiants d’Antoine Fermey et Dimitri Zéphir, leurs professeurs, ont été invités par la Ville de Paris, en septembre 2021, à bûcher sur ces fontaines. Elles ont été créées en 1871 à l’initiative de Sir Richard Wallace, surnommé La Providence des pauvres. Car il a eu l’idée en voyant les Parisiens subir une pénurie d’eau potable durant la Commune. Il fit alors don à la Ville de ces fontaines à boire inspirées des « drinking fountains » de Londres. La première a été installée en 1872, sur le boulevard de la Villette (Xe-XIXe). Le succès fut immédiat.
Mais mesure d’hygiène oblige, les gobelets historiques attachés aux fontaines de la Ville ont été retirés en 1952. Résultat, il est bien difficile aujourd’hui de faire passer sa gourde entre les quatre cariatides qui forment cet objet de la voirie parisienne. Et impossible de passer sa main et de poser les quelques gouttes pour se désaltérer. D’où l’idée de Karen Taïeb, adjointe à la maire de Paris chargée du patrimoine, dans le cadre des 150 ans de ce mini-monument historique — dont l’une a fait son entrée au musée Carnavalet — de faire appel aux étudiants pour le réinventer.
Des étudiants très inspirés
Après une sensibilisation sur la gestion de l’eau, la visite des réserves d’Eau de Paris et des ateliers de réédition des fontaines historiques, la créativité n’avait pas de limite. « Ils devaient repenser le monde de demain, s’inspirer de l’eau et rendre davantage visibles ces fontaines », cadre leur professeur. Un à un, en sortant de leurs réserves leur prototype ou en ouvrant leur ordinateur dévoilant les photos de leur objet miracle en forme de gobelet, de gourde ou de carte historique… tout y passe. Rachel voulait « décrocher la timbale ». D’où cet objet réinventé du passé. Elise, dans la même idée, est partie sur une petite flasque de 25 centilitres alors que Lisa a pensé aux sportifs avec sa gourde en néoprène accrochée à l’avant-bras. Elle sera en verre pour Divine, avec sa sangle en tissu « très urbaine et très dynamique », selon elle.
Niel, au regard amusé, propose une « rigole Wallace ». Un modèle pas du tout encombrant et qui permet de faire dériver le petit filet d’eau dans la bouche du consommateur. Souraya a pensé aux cafetiers proches des fontaines. Elle a alors imaginé quatre mini-carafes moulées avec les têtes des cariatides. L’occasion donnée aux clients des cafés et restaurants d’aller se servir à la source. Alors qu’Elisa y a vu l’occasion de créer un brumisateur portable !
Mais pas toujours facile de retrouver la fontaine près de chez soi. Raphaël y a pensé. D’où son idée d’une cartographie des fontaines sur Paris. Des petits trous qui forment une constellation. Alice et Jeanne ont plutôt pensé à un livret éducatif avec des mini-jeux pour les enfants afin de redécouvrir ces immenses fontaines qui leur sont inaccessibles !